Miroir, mon beau miroir…(1), de Nicolas Gouzy

Ce texte de Nicolas Gouzy en 6 épisodes sera publié au cours de l’été 2016, parution le mercredi.

photo miroir texte 1

Sortir de la douche au petit matin, dans une salle de bains froide et embuée, tout le monde le fait, souvent vite fait. Le temps d’un brossage de dents éclair devant un miroir qu’on ne regarde plus depuis le temps qu’il ne renvoie plus qu’une seule émission, celle du temps qui passe, et puis tout le monde file. J’ai pris le temps ce matin, le temps d’essuyer la buée sur mon miroir avec une serviette de bains qui filoche et que je me suis promis de jeter. Un ou deux va-et-vient qui vont laisser des traces et des peluches et…Rien ! Pas de moi en face ! Pas de face de moi là, à sa place ! Le reflet de ma douche et de l’étagère d’angle où reposent quelques produits de toilette de semi-luxe, neufs, cadeaux d’amies passées me suggérant sans doute que mon hygiène corporelle pouvait s’améliorer, mais rien de moi ! Surpris n’est pas le mot, ni interloqué, ni apeuré, ni rien ! Pas de mot ! J’en ai pourtant des tiroirs pleins, mais sur le coup, rien ! J’imagine bien que j’écarquille les yeux, que je dois avoir la mine des poissons des profondeurs sortis trop vite de la mer, mais je ne peux que l’imaginer. Je secoue connement la serviette pour vérifier que mon image n’y est pas restée collée. Je me penche, tentant de voir à mes pieds dans le miroir si mon reflet n’y gît pas, brisé, en morceaux. Bien entendu je n’arrive qu’à me cogner le front contre mon absence d’image. Je brandis mes mains, les lève bien haut. De ce côté-ci je les vois, mais de l’autre, rien, nada ! Vacance ! Vacance de moi au Pays du Miroir ! Je ne demande pas comment c’est possible. Le fait de constater que çà l’est me suffit amplement pour l’instant. J’ai une inspiration soudaine. Le miroir en pied de l’entrée ! J’y file ! J’y suis ! C’est bien moi, pas de soucis, je reconnais bien mon air gris, ma brioche, mon caleçon, mes épaules maigrelettes et mes cheveux humides ; tout est à moi, inversé comme il se doit. WTF alors avec le miroir sans moi de la salle de bains ? Mauvaise blague, grève, panne, mirage, illusion d’optique, attaque cérébrale ? J’y re-vais. Toujours pas. C’est flippant, finalement, de se voir transparent ou plutôt de se retrouver aux abonnés absents. Tout est bien là, sauf moi ! Sauf et, (tiens ?) ce que je tiens, ni reflet de peigne, ni reflet de brosse à dents, ni rien. Mais dès que je les pose ils sont bien là, bien là-bas aussi, ressurgissant du néant où mon contact les a plongés un instant […]

(à suivre)

Lapin ! Memento Mori !, de Nicolas Gouzy

Lapins clapier
J’étais un « cuniculicide » et je suis toujours un « cuniculiphage ». Je dois me confesser de ces centaines de lâches assassinats que j’ai pu perpétrer sur ces petits animaux innocents aux longues oreilles et au museau en alerte communément appelés « lapins ». Ceux que je mange aujourd’hui sont élevés en batterie, engraissés aux granulés, bourrés d’antibiotiques, étourdis par électronarcose avant d’être tués, pelés et vidés à la chaîne, découpés et enfin emballés sous vide. Mais nous, nous en élevions des vrais, des vivants, dans des coffres en bois ajourés et branlants sans cesse retapés. Cela aurait pu s’appeler des clapiers, presque. Lire la suite…

Pot au feu, de Nicolas Gouzy

Bouillonfeu

Je ne sais pas vous mais moi, quand il ne fait pas beau comme ça, j’ai envie d’un bon pot-au-feu. Le Pot’au’f. ou Potof pour les intimes, c’est d’abord une histoire d’eau bouillie ou plutôt d’ébullition. Au départ une recette anglaise (je vous jure !) du bœuf, du sel, de l’eau froide, un bouquet garni, une « bouillaison » lente et contrôlée, puis, au bout de quelques heures, après avoir vérifié la tendreté de la viande et écumé deux ou trois fois ce qui ne commence qu’à peine à devenir du « bouillon », on ajoute des légumes, dans l’ordre inverse de leur fragilité, le temps qu’il faut. Si l’on commence déjà à douter de sa viande à ce stade, on forcera sur l’oignon brûlé et le girofle, ou sur le bouillon Kub. On peut aussi choisir de tout mettre d’un coup dans un autocuiseur et de tout faire cuire de manière impatiente et un rien aléatoire, c’est vous qui voyez. À l’époque où la viande, les légumes et ma vie avaient encore du goût (la même époque que celle où les enfants savaient se tenir à table, étaient bien polis, où le franc c’était mieux que l’euro et où Roger Gicquel nous faisait encore frémir à la télévision), c’était suffisant. Lire la suite…

Vous reprendrez bien du cassoulet ? Ivy et Boris en Pays cathare, de Nicolas Gouzy

Vous reprendrez bien du cassoulet ? Ivy et Boris en Pays cathare, éditions CreateSpace (papier et numérique), avril 2016

 1ère de couv, Nicolas Gouzy, 2016Un roman policier gourmand avec une pointe d’hérésie que les initiés apprécieront à sa juste valeur

Lorsque Dan décide de rejoindre les adeptes d’une secte en Pays Cathare, Ivy s’arme de son chat Boris et part la sauver. Il devient l’instrument puis le principal acteur d’une enquête policière peu banale dans laquelle il devra subir de nombreuses épreuves initiatiques avant de triompher de ses ennemis. De souterrains en découvertes macabres, de banquets rituels en passages à tabac, malgré des passages à vide, il finira par retrouver Dan et par démanteler un réseau d’adeptes de l’ascèse extrême. Mais rien n’aurait été possible sans Boris le chat.
La suite des aventures du trio découvert dans Merci pour les fruits de mer.