Miroir, mon beau miroir…(épilogue), de Nicolas Gouzy

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Je lève un bras vengeur et… tout dérape ! Je m’y attendais un chouïa. Mon coup rencontre le vide ! Ma masse empêtrée dans les droïdes, emportée par son poids, file à travers le trou-miroir sans rencontrer la moindre résistance, comme si je l’avais projetée à travers une  ouverture dans la cloison. Déséquilibré, je trébuche et me vautre sur le lavabo que je percute la boule en premier, plein fer sur le rebord, KO, fondu au noir !

Je me réveille dans l’état que vous imaginez…Mon premier réflexe est de vérifier cet état dans le miroir, évidemment. Figurez-vous que je m’y vois ! Normalement, avec tout partout, et dans le bon décor cette fois ! Je ne suis pas beau à voir mais c’est un tel soulagement que j’embrasserais bien mon reflet. Quel bonheur de voir cet hématome bleui et gonflé me recouvrant la moitié de la figure, cette lèvre fendue soulignée par un filet de sang coagulé ! Je ne peux regarder qu’avec l’œil droit, l’autre est gonflé, quasi fermé, mais c’est un régal ! Mes esprits me reviennent peu à peu, comme mon reflet m’est revenu et justement…Merde ! Quelque-chose cloche. Là-bas, dans le reflet, la masse a fracassé la paroi vitrée de la douche et la serviette Star-Wars gît sur une jonchée de verre brisé. Je me retourne. Tout est intact « chez moi ». Je tâte le miroir de la main, lisse, dur et frais. Le coup sur la tête a dû me faire perdre les pédales. J’ai tout rêvé dans le temps de mon petit coma, allongé sur le carrelage. Rien de tout ceci n’est arrivé et dans quelques secondes les deux côtés de mon miroir seront enfin semblables.

C’est ce que je pense, ce que je souhaite, ce que j’espère. Je vais chercher de la glace dans le congélateur de mon frigo pour me mettre sur la tronche. Je farfouillerai dans les placards pour trouver de l’aspirine quelque part et un whisky aussi. Peut pas faire de mal, vu l’état du buveur. Mais sitôt le seuil de la salle de bains franchi, j’entends dans mon dos un fracas de verre brisé et un autre choc, sourd, au sol. Je me retourne suffisamment vite pour englober dans un seul coup de l’œil qui me reste : la version face de la paroi de douche ravagée et l’image du dos d’un « moi-pile », quittant l’autre-côté de ma salle de bains dévastée « pour de vrai » tout en me faisant un doigt d’honneur tout à fait terrifiant.

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