« Ruines » de Perrine LE QUERREC, par Jean Azarel

Chronique de lecture : « Ruines » de Perrine LE QUERREC, Tin­bad ‚ coll.  Tin­bad poé­sie, Paris, 2017

Berlin 1953 / Unica / Voit Hans, son fantôme du Paradis / Enfant recherché. Hans / Voit Unica, sa poupée  incarnée / Enfant détournée.

Abasourdi, scotché, électrisé, saigné, comme vous voudrez, par la lecture du dernier ouvrage de P.L.Q (P.L.Q : je persiste et signe dans l’utilisation des initiales), j’ai d’abord cru que je n’en dirai rien tant la postface de Manuel Anceau est juste et parfaite. Mais comment rester silencieux et garder pour soi ce qui impose d’être partagé ; puisque comme l’a chanté Jean-Louis Murat « ce qui n’est pas donné est perdu, ce que tu gardes est foutu ». Il est vrai aussi, Ruines confortant l’aveu, que je suis définitivement amoureux  de cette langue posologique et de son auteure. Jusqu’à trépas. (Et au-delà d’après certains.) Car l’écriture de Perrine le Querrec (en toutes lettres) est maudite comme le cinéma de Philippe Garrel est maudit. Un petit cercle de lecteurs chez l’une, un quarteron de spectateurs chez l’autre, même si le temps aidant à la connaissance du talent, le cercle des fidèles s’élargit lentement. Tant il est vrai que la vérité fait toujours peur, quand elle n’est pas carrément effroyable.

Ainsi de l’histoire d’Unica Zürn, poupée de chair docile, et d’Hans Bellmer, homme jasmin vénéneux manipulateur, que résume en pages serrées, quasi télégraphiques parfois, le livre factuel et sans parti-pris de Perrine Le Querrec. Unica l’unique, femme précieuse, songe-plein de créativité naïve, brutalement transmutée « à l’insu de son plein gré » en créature fantasmée, hybride et changeante à l’infini, au prix fort de moult humiliations et perversions que d’aucuns verront comme la manifestation de la face obscure de l’amour. Lire la suite…