Miroir, mon beau miroir…(3), de Nicolas Gouzy

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…/… Pas trop loin non plus. Je m’écroule sur le canapé/pouf/lit d’appoint du salon/cuisine/pièce à tout de mon appartement, le cœur battant la chamade, au bord des lèvres aussi. Certains ont des monstres sous le lit, des araignées au plafond et des cadavres dans le placard, moi j’ai hérité d’un miroir en retard ! Je m’exhorte au calme et à la réflexion. Des nèfles ! Combien de fois me suis-je dit, en regardant un documentaire sur le surnaturel : « C’est le bordel leurs techniques pour enregistrer des manifestations paranormales, pas étonnant qu’ils chopent rien de plus probant qu’un couinement de porte, faudrait changer leurs protocoles » ? Mais je n’avais pas imaginé comment une intrusion paranormale, (même poétique parce que mon image « rediffusée »  ne m’avait pas sauté à la figure pour me dévorer, du moins pas encore), pouvait vous priver de tout sens critique et vous laisser sidéré, le cerveau tournant à plein régime mais à vide, sans pouvoir embrayer sur une idée constructive. J’ai été nourri et je me gave encore de tout ce que les studios de cinéma du monde entier peuvent produire d’histoires fêlées, dérangées, dérangeantes, hallucinées et j’en passe. Ce n’est pas à proprement parler une « culture », c’est une distraction envahissante, un long catalogue d’images, de situations, de climax et de characters  qui finissent par devenir familiers au point d’être prévisibles, quelquefois lassants dans leur répétition même. Là, pas loin, je tiens quelque chose d’unique, de perso, un événement dont je suis le héros malgré lui, malgré moi. Il faut que j’assume, j’ai l’âge. Lorsque j’ai emménagé, j’ai hérité des anciens locataires à peu près tout ce qui meuble l’appart encore aujourd’hui. Sauf deux ou trois bricoles, cafetière, brosse à dents, trois photos fétiches et deux vieux doudous. La flemme d’aller chez Ikea pour acheter les mêmes merdes que des milliers d’autres pékins et pas les ronds pour du design classe, autant conserver ce que mes prédécesseurs m’avaient cédé. Pourvu que le miroir fêlé n’ait pas enregistré leurs milliers d’heures balnéaires et décidé de me les repasser en mode rewind ! Comme on ne règle pas les horaires d’enregistrement sur un miroir (enfin je ne crois pas) pas moyen de prévoir quoi que ce soit. Avant de prendre une décision radicale et de le dérégler une bonne fois pour toutes en y pétant sa face à coups de marteau (qu’il va falloir que j’aille acheter et tant pis pour les sept ans de malheur promis), il faut que nous ayons un entretien, en face à face si je puis dire. …/…

Miroir, mon beau miroir…(2), de Nicolas Gouzy

 

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…/… Je décide de surseoir à toute autre investigation (Je sursois très bien, une autre forme de procrastination, j’ai souvent sursis, pour le service militaire, pour une petite peine d’emprisonnement aussi, un sursis c’est toujours bon à prendre) et je pars « réfléchir » au bistrot du quartier où je bois mon petit jus du matin. Je jette tout de même un œil inquiet à tout ce qui mire, reflète, renvoie, incidemment ou directement, une image de moi. C’est bon, y’en a, plein, des mire-moi. Pavés lustrés du hall, rétroviseurs des voitures alignées le long des trottoirs, glaces et vitrines de la rue, grand miroir du bar, lunettes de Gégé, métal argenté d’une salière oubliée, reflets bombés des deux côtés de la petite cuiller, je peuple dignement mon monde d’inversions plus ou moins déformées de mon moi encore un peu inquiet. Avouez qu’il y a de quoi ! J’en suis là et j’en suis las. Il ne me revient pas d’histoires de reflets qui se sont barrés de leurs miroirs ou bien de miroirs fatigués de refléter leurs propriétaires. Il y a bien les vampires que la mythologie hollywoodienne prive du reflet allégorique de leur âme disparue. Il y a bien Alice qui passe de l’autre côté. Il y a ceux sans tain qui dissimulent des voyeurs, psychopathes, profilers, inspecteurs et autres lance-flammes vengeurs. Il y a bien des choses en plus, en plus ou moins malveillant, malvoyant, qui apparaissent dedans, mais en moins…Je ne vois pas. Comme j’ai la chance ( ?) de ne pas avoir à aller bosser à l’autre bout de la ville puisque mon bureau c’est chez moi, je rentre au boulot. J’ai deux ou trois papiers à la con à écrire sur des glaces tendance en pots tendance dont le glacier-tendanceur n’a pas eu la délicatesse de m’en faire livrer quelques échantillons. Je vais improviser. Tant pis pour lui. Le miroir de mon couloir me renvoie poliment une image matinale dans laquelle, bien qu’habillé, je reste gris et fatigué. C’est un bon début de retour à la normalité. J’ai dû laisser la lumière allumée au-dessus du miroir vide la salle de bains car un rai lumineux filtre sous la porte…Je prends mon courage à deux mains (en vérité, pour ce que j’en ai, je pourrais aussi bien le pincer entre deux doigts), j’ouvre et décide d’en avoir le cœur et les yeux nets. Je ne comprends pas tout, du premier coup, tout d’un coup… Je vois…Je me vois ! Me déshabiller, entrer dans la douche, pisser sur la bonde (disons que ça vous ne l’avez pas vu), ouvrir l’eau, me savonner, me rincer, me sécher, puis me pencher vers le grand miroir scellé au-dessus du lavabo, essuyer la buée et me regarder, ébahi ! Ce con de truc m’a enregistré et il se repasse la scène. Je suis devant et maintenant je me vois en train de tenter de me voir, hagard, cherchant des yeux mon regard ! Alors je crie et je m’enfuis ! …/…

(à suivre)

Bonne nouvelle pour les auteurs, 18 juillet 2016

Communication de la SGDL (transmise parJoëlle Wintrebert)

« Lundi 18 juillet 2016

Bonne nouvelle pour les  auteurs : les éditeurs seront désormais sanctionnés en cas de défaut de paiement des droits.

La SGDL avait demandé dès 2015 à reprendre les discussions avec les éditeurs sur de nombreux sujets restés en suspens malgré l’accord important obtenu sur le nouveau contrat d’édition en 2014. Parmi ces points, l’absence de sanction pour défaut de paiement des éditeurs figurait en bonne place et a fait l’objet, avec d’autres sujets encore en cours, de nouvelles négociations entre le CPE et le SNE.
Un accord étant rapidement intervenu sur ce sujet, la toute récente Loi Création, Architecture et Patrimoine du 7 juillet 2016 a permis d’intégrer au code de la propriété intellectuelle un nouvel article qui sanctionne l’absence de paiement des droits d’auteur par une résiliation de plein droit du contrat.
L’article L.132-17-3-1 du CPI précise en effet désormais que l’éditeur doit procéder au paiement des droits au plus tard six mois après l’arrêté des comptes, sauf convention contraire, et que faute pour celui-ci de procéder au paiement dans ces délais, l’auteur peut, durant les douze mois qui suivent, mettre l’éditeur en demeure de régler ces droits d’auteur. Si cette mise en demeure n’est pas suivie d’effet dans un délai de trois mois, le contrat est résilié de plein droit.

La SGDL se félicite d’autant plus de cette nouvelle disposition pour les auteurs qu’une jurisprudence est encore venue récemment en illustrer toute l’importance. Un juge a condamné un éditeur qui ne payait pas depuis plusieurs années ses droits à un auteur, mais n’a pas donné suite à la demande de l’auteur de résilier le contrat en question. Ce sera désormais automatique pour tous les auteurs qui le souhaitent.»

Un courrier type de mise en demeure est disponible sur le site de la SGDL : ici

 

Miroir, mon beau miroir…(1), de Nicolas Gouzy

Ce texte de Nicolas Gouzy en 6 épisodes sera publié au cours de l’été 2016, parution le mercredi.

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Sortir de la douche au petit matin, dans une salle de bains froide et embuée, tout le monde le fait, souvent vite fait. Le temps d’un brossage de dents éclair devant un miroir qu’on ne regarde plus depuis le temps qu’il ne renvoie plus qu’une seule émission, celle du temps qui passe, et puis tout le monde file. J’ai pris le temps ce matin, le temps d’essuyer la buée sur mon miroir avec une serviette de bains qui filoche et que je me suis promis de jeter. Un ou deux va-et-vient qui vont laisser des traces et des peluches et…Rien ! Pas de moi en face ! Pas de face de moi là, à sa place ! Le reflet de ma douche et de l’étagère d’angle où reposent quelques produits de toilette de semi-luxe, neufs, cadeaux d’amies passées me suggérant sans doute que mon hygiène corporelle pouvait s’améliorer, mais rien de moi ! Surpris n’est pas le mot, ni interloqué, ni apeuré, ni rien ! Pas de mot ! J’en ai pourtant des tiroirs pleins, mais sur le coup, rien ! J’imagine bien que j’écarquille les yeux, que je dois avoir la mine des poissons des profondeurs sortis trop vite de la mer, mais je ne peux que l’imaginer. Je secoue connement la serviette pour vérifier que mon image n’y est pas restée collée. Je me penche, tentant de voir à mes pieds dans le miroir si mon reflet n’y gît pas, brisé, en morceaux. Bien entendu je n’arrive qu’à me cogner le front contre mon absence d’image. Je brandis mes mains, les lève bien haut. De ce côté-ci je les vois, mais de l’autre, rien, nada ! Vacance ! Vacance de moi au Pays du Miroir ! Je ne demande pas comment c’est possible. Le fait de constater que çà l’est me suffit amplement pour l’instant. J’ai une inspiration soudaine. Le miroir en pied de l’entrée ! J’y file ! J’y suis ! C’est bien moi, pas de soucis, je reconnais bien mon air gris, ma brioche, mon caleçon, mes épaules maigrelettes et mes cheveux humides ; tout est à moi, inversé comme il se doit. WTF alors avec le miroir sans moi de la salle de bains ? Mauvaise blague, grève, panne, mirage, illusion d’optique, attaque cérébrale ? J’y re-vais. Toujours pas. C’est flippant, finalement, de se voir transparent ou plutôt de se retrouver aux abonnés absents. Tout est bien là, sauf moi ! Sauf et, (tiens ?) ce que je tiens, ni reflet de peigne, ni reflet de brosse à dents, ni rien. Mais dès que je les pose ils sont bien là, bien là-bas aussi, ressurgissant du néant où mon contact les a plongés un instant […]

(à suivre)

Le Hippie cévenol, roman d’Hervé Pijac

Le Hippie cévenol, roman, TDO Editions, Collection Poche, juillet 2016

Hippie_Hervé PIJAC

La quête initiatique d’un jeune hippie « post soixante-huitard » qui, après bien des tribulations, rencontrera un destin intense et dramatique en retrouvant ses racines au cœur des Cévennes. L’histoire – déjà ! – du mouvement hippie.

Recours contre le dispositif ReLIRE, 7 juillet 2016

ReLIRE_articleActuLitté

Ici relayé, le message du président du SELF, Christian Vila, du 7 juillet 2016.

« Les conclusions de l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) donnent raison à celles et ceux – dont le SELF « personne morale », l’association ADA (LR) et 35 auteurs, pour la plupart membres du SELF – qui se sont engagés à la suite de nos camarades Yal et Sara dans le recours contre le dispositif ReLIRE, qui spolie le droit des auteurs à disposer de leurs œuvres.

« Seuls l’auteur et ses ayant-droit peuvent autoriser la reproduction de tels livres », estime M. l’avocat général.
Deux articles d’Actualitté qui traitent du sujet (de Nicolas Gary – 07/07/2016) :
ReLIRE : la numérisation des livres indisponibles considérée illégale par l’Europe
Numérisation de livres : ReLIRE hors la loi, pour avoir méprisé les auteurs

Et pour les vrais fous qui voudraient lire le texte intégral des conclusions de l’avocat général, c’est ici

Nous avons donc gagné une bataille vitale, mais pas encore la guerre. Si la CJUE suit le plus souvent les conclusions de son avocat général, elle n’y est pas tenue. Son verdict ne sera connu que cet automne, et le dossier devra ensuite revenir devant le Conseil d’État. »

Illustration : ActuaLitté CC BY SA 2.0  

… (probablement) un homme

L’auteur français a 55 ans, signe de son vrai nom et est (probablement) un homme

lire ici l’article d’Antoine Oury, du 21 juin 2016 publié sur le site ActuaLitté

repartition homme femme edition 2015

Une étude réalisée par la BNF, à partir du dépôt légal. Ses conclusions ne surprendront personne, mais c’est toujours intéressant d’examiner décomptes et graphiques.

proposé par Joëlle Wintrebert / illustration graphique empruntée au site ActuaLitté

Nouvelles dispositions relatives à la reddition des comptes

Lundi 13 juin 2016.
Les nouvelles dispositions relatives à la reddition des comptes s’appliquent dès 2016.
avec le commentaire de Joëlle Wintrebert

À noter la troisième hypothèse, fort intéressante.
Rappelons que si l’éditeur n’envoie pas ce relevé (ou envoie un relevé non conforme), l’auteur peut récupérer ses droits si l’éditeur ne s’est toujours pas acquitté de son obligation après mise en demeure (recommandé AR). L’auteur a six mois pour y procéder après le 30 juin. Et l’éditeur a trois mois pour répondre après la mise en demeure de l’auteur.
Rappelons aussi que si l’éditeur contraint l’auteur à lui envoyer une nouvelle mise en demeure l’année suivante, le contrat est résilié de plein droit dans les six mois de la nouvelle mise en demeure.
Les courriers types de la SGDL sont parfaitement opérants.
Petit à petit, les éditeurs cesseront peut-être de se montrer tout-puissants ?

shrek-4-il-etait-une-fin-10520

Pour mémoire, tout éditeur doit, au moins une fois par an, rendre compte de l’exploitation des œuvres à ses auteurs et ayants droit et verser les droits y afférents. La reddition des comptes doit intervenir à la date prévue au contrat ou, au plus tard, six mois après l’arrêté des comptes. D’une manière générale un éditeur arrête ses comptes, chaque année, au 31 décembre.
Trois hypothèses se dégagent alors : Lire la suite…